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Débloquer l’accès aux soins : Élaborer une stratégie nationale pour venir en aide aux Canadiens atteints de maladies rares

By Sandra Anderson

L'accès aux soins de santé est une expression souvent utilisée.

Dans certains cas, l’accès renvoie à la capacité d’un patient à recevoir des soins primaires ou à obtenir une consultation avec un spécialiste. Dans d’autres, il peut s’agir de l’accès à des soins chirurgicaux ou à des produits pharmaceutiques essentiels, comme des vaccins ou des traitements curatifs qui prolongent l’espérance de vie. Un certain nombre de facteurs peuvent avoir une incidence sur l’accès aux soins. Cependant, les obstacles sont particulièrement marqués pour les patients canadiens atteints de maladies rares. 

Un Canadien sur douze est atteint d’une maladie rare, ce qui équivaut à environ trois millions de personnes. Les deux tiers sont des enfants. Il n’existe pas de définition parfaite qui englobe les plus de 6 800 maladies rares, parmi lesquelles figurent la fibrose kystique, la sclérose en plaques et l’hémophilie. Toutefois, les maladies rares sont souvent chroniquement invalidantes ou potentiellement mortelles. Pour de nombreux patients, l’accès aux soins peut être retardé ou entravé par divers facteurs, notamment des retards de diagnostic, des difficultés de remboursement ou le fait que les options thérapeutiques disponibles soient limitées. Il existe des traitements pour seulement environ 10 pour cent des maladies rares, et seuls 60 pour cent de ces traitements parviennent jusqu’au Canada. Même lorsque des traitements sont disponibles, l’accès aux produits varie grandement en fonction, notamment, de l’endroit où vit le patient, de la manière dont le traitement est payé et du type de couverture dont disposent le patient et sa famille.  

Santé Canada a fait un grand pas bien nécessaire pour s’attaquer à ce problème de longue date et aux disparités d’accès existantes lorsqu’il a annoncé des plans pour élaborer une stratégie nationale visant les médicaments pour le traitement des maladies rares. Grâce aux premiers 500 millions de dollars affectés à cette stratégie cette année, 2022 représente une année charnière pour accélérer cet effort urgent et établir officiellement un cadre national unique pour garantir un accès équitable et cohérent aux traitements, quel que soit le lieu de résidence des patients ou leur accès au financement. Alors que Santé Canada élabore le cadre initial en collaboration avec les parties prenantes de l’ensemble de l’industrie, il est essentiel de tenir compte des facteurs avec lesquels les patients doivent concilier durant leur cheminement, et de mettre en œuvre un processus d’approbation et de couverture novateur. Il faut idéalement que le paiement soit fondé sur des études à long terme en situation réelle portant sur l’efficacité et l’innocuité.

Un soutien tout au long du cheminement du patient
Puisque l’on connaît et que l’on comprend trop peu ces maladies, un patient doit souvent attendre, en moyenne, sept ans avant de recevoir un diagnostic précis de maladie rare. Mais même après avoir reçu un tel diagnostic et s’être fait prescrire un traitement médicamenteux, le patient emprunte un parcours complexe, surtout lorsqu’il est très malade et qu’il ne bénéficie que d’un soutien limité pour entreprendre ce processus difficile. Le cheminement de chaque patient est unique. La compréhension limitée des mécanismes et des critères de remboursement publics et privés, associée à la complexité des formalités administratives et des exigences en matière de tests, peut retarder le traitement et accroître l’anxiété et la crainte des patients et des aidants. De nombreux traitements indiqués dans le cas de maladies rares ont des exigences uniques en matière d’administration, qui nécessitent une formation personnalisée supplémentaire et une surveillance continue sur le plan clinique et de l’innocuité. Les processus de remboursement peuvent être déconcertants, et les patients et les familles ont souvent de nombreuses questions sur la manière d’accéder aux services de soutien spécialisés.

À ces obstacles peuvent s’ajouter des difficultés liées à l’accessibilité financière. En 2019, 93 médicaments pour le traitement de maladies rares approuvés au Canada coûtaient plus de 100 000 $ par patient et par an, selon le Conseil d’examen du prix des médicaments brevetés. Le coût de ces médicaments peut également constituer un défi pour la viabilité à long terme des régimes de remboursement des médicaments gouvernementaux et d’employeurs. Afin de limiter l’incidence de ces médicaments sur les budgets des systèmes de santé, Santé Canada peut intégrer des options spécifiques, comme des modèles de rémunération au rendement ou le partage des coûts et la mise en commun des risques. 

Les programmes de soutien aux patients – financés par les fabricants – jouent un rôle précieux puisqu’ils permettent à de nombreux patients de s’orienter dans le système de soins de santé et d’accéder aux médicaments. En effet, grâce aux services offerts par ces programmes, comme l’aide financière et le soutien en matière de remboursement, les patients peuvent amorcer leur traitement plus tôt. Par exemple, le personnel infirmier clinique et ambulant dispense une éducation et une formation sur l’auto-injection, assure un suivi rigoureux en matière de sécurité, et administre des injections et des perfusions dans des cliniques privées locales ou au domicile des patients. Grâce à ses programmes de soutien aux patients, Innomar Strategies a aidé plus de 10 000 patients à accéder à des traitements contre les maladies rares en 2020. La complexité du cheminement du patient met en évidence la nécessité d’instaurer un soutien de bout en bout. Il est donc essentiel que le cadre national ne se limite pas à l’accès aux médicaments, mais tienne compte également des services nécessaires pour accéder au traitement et l’obtenir. 

Utiliser les données en situation réelle pour optimiser les résultats
L’un des éléments clés pour optimiser l’accès des patients à ces traitements – maintenant et dans l’avenir – est l’établissement d’un processus efficace de collecte et d’analyse des données et des preuves en situation réelle. Les données permettront de préciser l’utilisation et l’efficacité des traitements, ce qui est essentiel non seulement pour mettre l’accent sur les résultats pour les patients, mais aussi pour fournir aux décideurs les renseignements nécessaires pour appuyer les décisions en matière de réglementation et de remboursement. L’utilisation de données et de preuves en situation réelle est particulièrement importante pour ces traitements, puisque cette information cible des maladies qui touchent un petit nombre de personnes. Durant la phase de développement des produits, les essais cliniques portant sur les traitements contre des maladies rares impliquent souvent un nombre réduit de patients et sont moins susceptibles de recourir à la répartition aléatoire. Ces facteurs rendent plus difficile la génération des données et des renseignements que les payeurs recherchent. 

Dans le cadre de sa stratégie, Santé Canada peut établir un système national de collecte et d’analyse des données. L’occasion est bien choisie pour exploiter les sources de données actuelles et créer des partenariats entre les fournisseurs de services intégrés et les payeurs publics dans le but de collecter des données probantes en situation réelle pour appuyer la stratégie globale d’utilisation des données en situation réelle, afin d’éclairer la prise de décision. Ce processus de collecte de données, qui peut être lancé après l’approbation du produit par Santé Canada, peut accélérer l’accès des patients aux traitements et aider les organismes de réglementation à découvrir plus rapidement le comportement du médicament en situation réelle. Par ailleurs, Santé Canada peut chercher des occasions de se joindre à un réseau international pour avoir accès et contribuer à un plus grand bassin de données en situation réelle. En collaborant avec des pays du monde entier, le Canada peut adopter des pratiques exemplaires pour améliorer l’accès des patients et tirer parti des ensembles de données existants pour appuyer les décisions concernant les produits offerts sur le marché canadien.

Bien que l’attention et l’investissement accrus consacrés à l’élaboration de cette stratégie représentent une avancée monumentale, il est important de maintenir cet élan et de susciter des changements à long terme qui auront des répercussions positives sur la vie des Canadiens atteints de maladies rares. D’ici à la Journée mondiale des maladies rares en 2023, il est essentiel que Santé Canada, en collaboration avec les parties prenantes de l’industrie, prenne des mesures significatives pour dévoiler une stratégie nationale qui réponde adéquatement aux besoins uniques des patients et des aidants afin de garantir un accès cohérent et équitable aux médicaments et aux services dont ces derniers ont besoin.


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Sandra Anderson
Vice-présidente principale
Commercialisation et stratégie
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